Nicole Gaulier 2006

Investir une surface. En prendre possession en imprimant une marque, comme on tatoue une bête. 
Il s’agit ici de conquérir une parcelle d’infini ; à la manière de Buren ou de Viallat, artistes qui, depuis la fin des années soixante, disposent régulièrement, l’un des bandes de couleur dans les espaces publics, l’autre toujours la même tache, sur des supports improbables. 

Inventer un monde. Suivant les principes des théoriciens de l’Art Concret, adopter une règle élémentaire et l’appliquer soigneusement. De l’imagination surgit le principe et du principe la méthode. Ici, un rouleau, préalablement gravé, est utilisé pour recouvrir le plan. Les limites de l’instrument définissent des lignes horizontales. Et les limites des supports - des feuilles de papier juxtaposées - en définissent d’autres, verticales.

Concevoir des signes, intuitivement creusés dans la matière de l’instrument. Les imprimer plutôt que de les dessiner. Les faire ainsi surgir en réserve, en manque. Au fur et à mesure du travail, les voir, tels les mots d’une langue inconnue, revenir.

 

 

Nourrir la surface. Travailler une matière épaisse, colorée, onctueuse. Écrasée ici, hérissée là, elle vibre. « Peinture en braille », dit l’artiste. L’effet obtenu est sensuel, organique.

Multiplier les passages. « Tout recouvrir. Parce que j’ai besoin d’oublier ». Brouiller les motifs à force de les superposer, jusqu’à ce que ne demeure qu’une ambiance. Une vibration de gouttes de pluie, de brins d’herbes. 

Cheminer ainsi, en ignorant l’issue, en la souhaitant heureuse. Répéter les gestes comme le font les ouvriers spécialisés en attendant l’heure de la sortie ; et les chamanes, en préparant la transe. Nicole Gaulier, elle, espère l’éblouissement.


Françoise Monnin, juin 2006.

 


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