«
L’inquiétante étrangeté »
de Nicole Gaulier
Un,
dix, cent, mille… L’univers de Nicole Gaulier se
construit dans la répétition et dans la
variation. Les lignes qu’elle brodait hier et
qu’elle peint ou qu’elle imprime aujourd’hui,
sur des supports aussi variés que la faïence, le
papier, la toile, ou des objets manufacturés -
sacs, chaussures, parapluies, etc. - constituent
des signes calligraphiques. Juxtaposés, alignés,
rassemblés, chacun de ces modules s’inscrit dans
une série qui dévore l’espace où elle est
présentée. Chaque support donne à chaque signe
son format, définit ses limites. Ainsi le
spectateur se trouve-t-il embarqué dans un
univers foisonnant mais ordonné. Au vertige
provoqué par l’énergie des gestes générant les
formes répond la discipline de la mise en scène
des séries. Ainsi l’artiste procède-t-elle,
jusqu’à épuisement des possibilités d’une
combinaison.
Une
année, des traces nerveuses sont marquées à
l’aide de gros bâtons de pastel gras sur de
longues bandes de papier flottant dans l’espace.
Une autre année, seule la couleur noire est
appliquée au pinceau, sur des urnes en faïence
dont l’artiste a préalablement dessiné la forme.
Les outils utilisés récemment, des rouleaux en
mousse, incisés de motifs, provoquent à leur
tour une nouvelle ambiance, à partir d’un même
motif répèté, au rythme de la circonférence de
l’instrument et de la superposition de ses
passages. Et tout cela est toujours sensuel,
travaillé dans l’épaisseur de la peinture
utilisée généreusement, riche en effets moirés
provoqués par la nature de l’outil. Chaque trace
vibre, chaque forme danse, manifestant une
intense vitalité, quand bien même la série, une
fois alignée, prendrait une allure relativement
policée. Il est ici question du Chaos et de
l’Ordre.
« Il y a toujours une surprise », dit Nicole
Gaulier pour expliquer la nécessité qu’elle
éprouve de tenter à chaque fois de nouvelles
expérimentations, de multiplier les effets, de
malmener aussi, parfois, les instruments et
jusqu’aux images précédemment inventées, que
l’artiste n’hésite jamais à déchirer ou à
recouvrir, pour en faire la matière de nouvelles
images à venir. Car il s’agit ici de faire,
encore et toujours, de passer outre le « blanc
souci » dont parlait le poète Mallarmé, à propos
de la question du sujet. Moins que le « quoi »
peindre, ce qui intéresse Nicole Gaulier, c’est
le «comment» peindre, l’exploration des
capacités – et au-delà, la preuve de l’existence
- de la chair de toute chose.
Françoise Monnin, décembre 2006.
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